Entretien avec un Muerty

Il s'était fait piéger. Cela arrivait rarement mais cela arrivait. Alors patiemment il mit ses mains dans ses poches et attendit, il n'y avait que cela à faire, toutes les choses avaient une fin il le savait. D'autant plus que de manière générale c'était lui qui mettait le point final, alors de temps à autre quand il se faisait piéger par quelqu'un comme ça il écoutait ce qu'il avait à dire. C'était toujours plus ou moins la même chose. Cette fois il s'agissait d'une jeune fille. A la jauger elle avait à peine 16 ans, et déjà le courage de songer à braver la mort. A la voir comme cela il songea qu'elle avait perdu un ou plusieurs proches. Sa famille, ses amis, un petit ami peut être? Ah oui c'était cela un petit ami. Oui il se souvenait de lui il avait aidé à son passage après cet accident. Les choses étaient moches parfois.

Très visiblement elle l'aimait, comme à chaque fois. C'était toujours la prunelle de leurs yeux et jamais ils ne pourraient vivre dans eux. Voilà à présent elle se mettait à pleurer, bientôt ce serait au tour de l'hystérie, l'angoisse, elle tenterait probablement de le frapper. Elle échouerait cela va sans dire, mais aveuglée par la rage il était possible qu'elle ne s'en rende pas compte. Comme il l'avait sentit le visage de cette jeune fleur se tordit de douleur, et elle commença à envoyer les griffes. Stoïque il esquiva continuant d'écouter attentivement. Elle lui hurlait des « Pourquoi? » à la figure, comme si il avait les réponses à ses questions, comme si lui il devait savoir. Comme si lui avait la réponse. Si elle savait.

Sans qu'elle ne s'en rende vraiment compte il la scruta au fin fond d'elle même observant peu à peu la chute. Semblable quasiment à chaque fois dans le fond, mais tellement différente en fonction des individus dans la forme. Elle se calmait seule et il laissa les larmes couler en silence, tandis que peu à peu les sanglots se faisaient de moins en moins nombreux, la respiration de moins en moins forte. Non prendre la parole à ce moment là n'était toujours pas assez amusant. Muerty savait ménager ses effets quand il le fallait tout simplement. Et la douleur était quelque chose qui était intéressant à observer tout simplement et ce dans tout ces stades. Les divertissements de ce genre étaient paradoxalement rare pour la mort. Surtout quand on se contentait du passage. Comme dit précédemment il se souvenait parfaitement du dit petit ami, il lui avait longuement parlé de celle qui à présent le fixait de son désespoir profond, il lui avait demandé la promesse de s'occuper d'elle, de s'assurer qu'elle s 'en remette. Lui avait gardé le silence. La mort ne promettait rien, elle mettait un terme un point c'est tout.

Soudain il sentit l'ambiance changer à nouveau, il le vit dans le visage de cette fille, une expression froide, résigné, volontaire, et très paradoxalement vide. C'était la fin il le savait il l'avait vu de trop nombreuses fois. Le jeu avait été court cette fois ci, mais amplement divertissant. Il observa un moment le temps, en apparence absent, mais en réalité on ne peut plus attentif à ce qui allait à présent se produire. C'était le meilleur moment, celui qu'après tout il préférait sans jamais oser le dire. Le vent souffla beaucoup plus fort, mais le soleil continuait de taper dans le ciel magnifiquement bleu et sans nuage. Alors seulement elle fit la requête habituelle. Celle qu'il l'emporte pour qu'elle puisse rejoindre celui qu'elle aimait plus que tout et qu'elle venait de perdre, pour qu'elle puisse faire durer cet amour vrai et qu' enfin ils vivent ensemble heureux tout les deux. Sans qu'elle le vit, Muerty effectua un sourire en coin. A chaque fois la même rengaine. L'humanité ne changerait donc jamais il fallait croire. Mais une fois encore il resta muet. Le moment de prendre la parole n'était pas encore venu, et le repousser au point X était une chose qui l'amusait au plus haut point. A nouveau elle se mettait à hurler, voulant à nouveau lui taper dessus, demandant pourquoi il ne répondait pas, pourquoi il n'accédait pas à sa requête, pourquoi il ...

Toujours ce silence. Lui dire que son moment n'était pas venu n'était pas la chose à faire Muerty le savait parfaitement. Alors qu'a nouveau elle se calmait elle leva les yeux sur lui et murmura d'une voix cassée par une tristesse et un désespoir d'une intensité peu commune : « Que vais je faire sans lui? » Muerty alors sortit les mains de ses poches et rajusta son badge sur son survêtement. Cette fois il allait prendre la parole. Ce fut avec une impassibilité mortellement inhumaine qu'il répondit de sa joyeuse voix d'outre tombe : « Mettez vous aux jeux vidéos. » Et sans plus attendre il profita du moment de choc pour s'en aller tranquillement vaquer à ses occupations. Les distractions le changeait souvent, mais il ne négligeait jamais son travail. Toujours la mort était à l'heure.

Et tandis qu'il laissait la jeune demoiselle complètement détruite par son désespoir il lui donnait rendez vous dans 50 ans, quand son heure serait venue.